Mois : novembre 2009

Seul ce qui brule – Christiane Singer



seul ce qui brule“Il vit sortir de derrière la tapisserie une femme, la plus belle qu’il était possible de regarder mais elle avait la tête toute tondue, le demeurant du corps habillé de noir… Elle alla s’asseoir au bout de la table, sans parler à nulluy et ny nul à elle. Après qu’elle eut mangé un peu, elle demanda à boire, ce que lui apporta un serviteur, dans un émerveillable vaisseau, car c’était la tête d’un mort dont les yeux étaient bouchés d’argent…”

De cette nouvelle de trois pages, la trente-deuxième de l’Heptaméron de Marguerite de Navarre, est né ce récit.

Il est une sorte d’hommage à la jeune fille de quinze ans que j’ai été qui, après lecture, avait inscrit une seule phrase:

Comme cette histoire me trouble!

De cette interjection monte en moi un frémissement de mémoire: la peur panique que je n’ai cessé d’éprouver une vie durant de toute tiédeur – Nihil nisi ardeat! Seul ce qui brûle! – et la hantise de vivre plat. (Extrait du prologue)

J’ai été assez surprise par cette lecture, d’abord parce que la couverture et le résumé m’avait laissé penser que j’abordais un roman de style gothique, ce qui n’est pas du tout le cas, nous sommes plutôt ici dans un texte philosophique sur le thème de l’amour. Inspirée donc par une nouvelle de Marguerite de Navarre, Christiane Singer évoque le destin d’un couple au XVIème siècle, déchiré par l’adultère et la jalousie. Elle donne la parole tour à tour au maitre de maison, Sigismund d’Ehrenburg, puis à sa femme, Albe. A travers Sigismund, on s’approche de la frontière fragile entre l’amour, la folie et la haine: Dans ses lettres il raconte le coup de foudre qu’il a eu pour Albe alors qu’elle n’avait que 13 ans, sa passion dévorante, les douleurs de la jalousie dans lesquelles il va s’égarer  et qui le conduiront à traiter sa femme de façon particulièrement cruelle (c’est dans le crâne de son supposé amant que la jeune femme boit chaque jour!).  Albe, elle, se confie à son cahier, évoque son enfance, les leçons de sa nourrice sur le mariage et les hommes. Enfermée, soumise à des humiliations quotidiennes, elle ne cède pourtant jamais à la colère et à la haine, et  témoigne d’un amour sans failles pour son mari. Le moment le plus intense de ce texte reste ce passage tiré de l’Heptaméron où Albe apparait tondue, vêtue de noir, et doit boire dans ce crâne serti d’argent, ce qui m’a donné très envie de me plonger dans l’oeuvre de Marguerite de Navarre. Le reste du récit m’a paru un peu fade en comparaison, même si le style solide de Christiane Singer apporte une certaine puissance à l’histoire. Malgré quelques réserves donc, “Seul ce qui brûle” est un beau récit sur la complexité et la richesse du sentiment amoureux.

Le livre de poche 2009, 120 pages, 4,50€ (1ère édition Albin Michel 2006)

Les avis d’Yspaddaden, LN, Leiloona, Praline.

Les accommodements raisonnables – Jean Paul Dubois


Note/4 etoiles



les accommodements raisonnables

Un scénariste toulousain d’âge mûr, Paul Stern, accepte de passer quelques semaines à Los Angeles afin d’adapter pour le marché américain un petit film français sans beaucoup d’intérêt, “Désarticulé”. Il laisse en France sa femme, Anna, profondément dépressive, et avec qui il ne parvient plus à communiquer. Dans les studios hollywoodiens dans lesquels il a pris ses quartiers, Paul rencontre Selma, le sosie d’Anna quand elle était plus jeune…

Plongé dans l’univers en carton-pâte de Hollywood, Paul va naviguer pendant presque un an entre fiction et réalité. La réalité, c’est son père, Alexandre, qui va se charger de l’entretenir, lui commentant régulièrement l’actualité française au téléphone: Nous sommes en 2008, ce sont les élections présidentielles et Alexandre est intarissable sur les candidats, le nouveau président, ses frasques amoureuses et ses dérives bling-bling.

Ce qui m’a touché avant tout dans ce roman, c’est l’infinie tendresse que semble éprouver Jean-Paul Dubois pour ses personnages, même s’il n’a de cesse de souligner leurs failles et leurs défauts. Paul, lâche et infidèle, tétanisé par la vie, se laissant porter par les évènements, aurait pu m’être antipathique, mais je l’ai finalement trouvé très attendrissant, j’ai aimé son regard vaguement désabusé et sa douce ironie. Son père, Alexandre a lui tout du veuf joyeux et indigne: alors que son frère, qu’il a tant détesté, vient de mourir, il va renier tout ce qu’il a été, tout ce qu’il a aimé comme si un verrou avait brusquement sauté, au grand dam de son fils. Mais les personnages les plus pathétiques sont les américains que côtoie Paul et qui évoluent dans un monde irréel et sans consistance: Walter Whitman, un producteur forcément cynique; Edward Waldo-Finch, looser magnifique, un metteur en scène tombé dans l’oubli qui rêve de reconquérir sa place; Selma, apparition fantôme qui se réfugie dans les brumes réconfortantes et destructrices de la drogue. L’ensemble manque un peu de rythme, mais Dubois mêle avec talent absurde et mélancolie, et cette belle galerie de personnages a suffit à emporter mon adhésion.

Points 2009, 275 pages, 7€  (1ère édition: Editions de L’Olivier 2008).

Les avis d’ Amanda, Clarabel, Val, Bouh, HecleaHerisson08, Loic, Laurent, Pauline, Emeralda, Tiphanie, Nathalie, Miiiel, Jelis.
Lu dans le cadre d’un partenariat entre les Editions Points et le Forum Livraddict, merci!

Le billet du week-end #9


Je commence par un bon plan: Pour lancer la série jeunesse Conspiration 365 (12 tomes en tout), l’histoire d’un jeune australien qui doit échapper aux assassins de son père, les éditions Rageot propose aux lecteurs de leur rembourser le premier tome: Il suffit de le lire et d’expliquer en 5 lignes pourquoi ce livre vous a plu (mais attention vous n’avez que 15 jours après l’achat pour demander le remboursement). Tous les détails de l’offre figurent sur le bandeau autour du livre.


Entre deux frasques (il plante régulièrement ses concerts ou ses interviews, méprise les journalistes, refuse d’avoir des papiers d’identité)  Soan, dernier gagnant de la Nouvelle Star,  a quand meme réussi à enregistrer son premier album.  Sa voix rappelle celle de Mano Solo, ses musiques celles des Têtes Raides (je me demande si Christian Olivier a participé à cet album),  un bon mélange!  Tant pis ne sort que dans quelques jours, mais vous pouvez déjà l’écouter sur Deezer


J’ai eu ma dose d’hémoglobine cette semaine, pas avec le deuxième volet de Twilight, mais avec les premiers épisodes de la série  The Vampire Diaries, adaptation des romans de L.J. Smith. Je suis un peu déçue pour l’instant, ça ne casse pas cinq pattes à un loup-garou! Je vous en reparlerais plus longuement si j’arrive au bout de la première saison.


Sinon les dimanches se suivent et se ressemblent, la pluie est encore là, je vais donc me réfugier dans ma lecture en cours, Les insomniaques de Camille de Villeneuve.

Bon dimanche à tous!

Across the universe – Julie Taymor

A la fin des années 60 Jude (Jim Sturgess) travaille dans un chantier naval de Liverpool. Elevé par une mère célibataire, il décide de tout quitter pour se rendre aux Etats Unis et rencontrer son père, un ancien G.I. qui ignore son existence. Sur le campus de Princeton, il rencontre Max (Joe Anderson) un jeune homme de bonne famille qui plaque ses études et l’entraine avec lui à New York. La jeune sœur de Max, Lucy (Evan Rachel Wood) attend quant à elle le retour de son petit ami parti combattre au Vietnam.

La libération sexuelle, l’explosion des codes musicaux, à bien des égards la fin des années 60 et le début des années 70 marquèrent un tournant social et culturel. Une époque résolument positive, où l’on croyait encore que tout était possible, malgré un contexte difficile aux Etats-Unis (La guerre du Vietnam, les émeutes raciales, l’assassinat de Martin Luther King), une époque qui reste une source inépuisable d’inspiration pour le cinéma. Tout a été déjà dit sans doute sur cette période,  et Across the universe ne révolutionne pas le sujet, mais les acteurs ultra-charismatiques (Evan Rachel Wood est divine) et le dynamisme de la réalisation transforment un scénario plutôt banal en un film très attachant, magnifiquement rythmé par les chansons des Beatles. Et la jolie histoire d’amour entre Jude et Lucy ravira tous les cœurs tendres! La réalisatrice Julie Taymor joue avec les clichés, certaines scènes psychédéliques sont un peu too much, mais c’est aussi cette furieuse extravagance qui fait le charme de ce film musical. Cerise sur le gateau on croise quelques guests prestigieux: Joe Cocker en chanteur de rue, Bono en gourou déjanté ou Salma Hayek en infirmière ultra-sexy…Across the universe est un film fou et poétique, romantique et énergique, un vrai moment de bonheur.

2007, 2h14, disponible en DVD. La B.O est à écouter ici.


La bande-annonce:


Prix littéraires 2009

Prix Goncourt : Trois femmes puissantes de Marie NDiaye (Gallimard)
Prix Goncourt des lycéens: Le Club des incorrigibles optimistes de Jean Michel Guenassia (Albin Michel)


Prix Femina: Personne de Gwenaelle Aubry (Mercure de France)
Prix Femina du roman étranger: Maurice à la poule de Mathias Zschokke (Editions Zoé)
Prix Femina de l’essai: Histoire de chambres de Michelle Perrot (Seuil)


Prix Medicis: L’énigme du retour de Dany Laferrière (Grasset)
Prix Médicis du roman étranger: Le grand quoi de Dave Eggers (Gallimard)

Prix Médicis de l’essai : Mémoires d’un fou d’Emma d’Alain Ferry (Editions du seuil)


Prix Renaudot: Un roman français de Frédéric Beigbeder (Grasset)
Prix Renaudot de l’essai ou document: Alias Caracalla de Daniel Cordier (Gallimard)

Prix Renaudot du livre de poche: Palestine de Hubert Haddad (Le livre de poche)
Prix Renaudot des lycéens : Ce que je sais de Vera Candida de Véronique Olvadé (L’Olivier)



Prix Interallié
: Jan Karski de Yannick Haenel (Gallimard) – a aussi obtenu le Prix Fnac 2009.

Prix de l’académie française: Les onze de Pierre Michon (Editions Verdier)

Prix de Flore: L’hyper Justine de Simon Liberati ( Flammarion)

Prix Décembre: La vérité sur Marie de Jean Philippe Toussaint (Editions de Minuit)