Catégorie : Lectures – Classement par Genre

Le jeu de l’ange – Carlos Ruiz Zafon (Rentrée littéraire 2009)


Dans les années 20, le jeune David Martin travaille pour un journal de Barcelone, La vox de la Industria, mais rêve de devenir écrivain. Grâce au soutien du riche et influent Pedro Vidal, il se voit confier l’écriture d’un feuilleton hebdomadaire, qui lance sa carrière littéraire. Il signe alors un contrat avec un duo d’éditeurs, achète la maison dont il rêvait, une grande demeure mystérieuse et fascinante, et peut espérer séduire  enfin la jolie Cristina. Mais le rêve tourne vite au cauchemar, ses éditeurs lui imposant un rythme infernal… Alors qu’il est à bout de forces, un autre éditeur lui propose une forte somme d’argent en échange d’un ouvrage un peu spécial, rien de moins que le texte fondateur d’une nouvelle religion.

Contrairement à ce que j’avais pu lire ici ou là avant de me plonger dans ce roman, Le jeu de l’ange n’est pas du tout la suite de L’ombre du vent,même s’il existe une filiation entre ces deux livres (que je vous laisse le plaisir de découvrir) et si on y retrouve quelques ingrédients connus (comme le cimetière des livres oubliés). J’ai été plutôt séduite par le début du roman qui raconte l’ascension du jeune écrivain, et par l’atmosphère que l’auteur prend le temps d’installer: A 1000 lieux des clichés touristiques, Barcelone apparaît comme une ville mystérieuse et envoûtante, aux rues tortueuses et aux demeures inquiétantes, dans la grande tradition des romans gothiques. Dans cet univers très sombre, le vieux libraire Sempere ou la jeune Isabella apportent une bouffée d’air frais, et j’ai particulièrement aimé ces deux personnages magnifiques, aussi généreux et lumineux que David, papillon de nuit, peut être égocentrique et ténébreux. Malheureusement la suite du roman est plus laborieuse, s’éparpille un peu dans tous les sens, s’attarde sur l’ histoire d’amour peu convaincante entre David et Cristina, et finit par s’enliser dans la relation malsaine et semi-fantastique que David entretient avec son éditeur. Le jeu de l’ange n’est pas un mauvais livre, loin de là, mais n’est à mon avis pas à la hauteur de l’attente qu’avait suscité L’ombre du vent.

Robert Laffont 2009, 544 pages, 22€

(Merci à)


Pourquoi j’suis pas aux Maldives – Soledad Bravi


Pourquoi j’suis pas aux Maldives? est en fait un best of de deux B.D. publiées précédemment (La BD des paresseuses tome 1 et tome 2).  Soledad Bravi, dont les silhouettes longilignes sont bien connues,  pointe ici avec beaucoup d’humour toutes les contradictions de la gent féminine: Comment, entre autres, faire un régime tout en s’empiffrant de gâteau au chocolat, ou faire du sport sans se fatiguer…! Elle décortique sans pitié le quotidien au féminin sous toutes ses facettes: notre addiction au shopping et aux séries télé, notre sac à main toujours trop lourd, le boulot et les réunions inutiles du lundi matin, les vacances et les tenues de ski ridicules, sans oublier évidemment nos relations complexes avec les hommes. Ce n’est en général pas très flatteur, mais avouons le, c’est plutôt bien vu! L’ensemble est inégal, manque parfois un peu d’audace et d’originalité, mais ces petites tranches de vie légères et drôles restent très agréables à lire.

Marabout 2009, 82 pages, 9,90€


Les aimants – Jean Marc Parisis (Rentrée littéraire 2009)


C’était en juin, le dernier mois de mes vingt ans, dans une salle de cours, au rez-de-chaussée de la Sorbonne, avant le début d’un examen de version d’anglais. Elle s’est faufilée entre les tables, a tournoyé entre les premiers rangs, avant de ralentir, de se rappeler qu’on lui avait donné un nom, de se résoudre à le déchiffrer sur l’un des bristols qui recouvraient le trou des encriers. Elle a repris sa course, pour s’arrêter devant mon pupitre. Nos noms débutaient par la même lettre, nous étions réunis par l’alphabet.” C’est ainsi que  le narrateur rencontre la divine Ava, et tombe sous son charme, alors que la jeune fille se laisse plus difficilement séduire. Pendant plus de vingt ans ils entretiendront une relation complexe, tour à tour amis, amants, aimants.


La première partie de ce livre raconte une histoire d’amour assez classique entre un “Gatsby de banlieue” et une jolie Parisienne de bonne famille. L’auteur tente de nous faire partager le sel de cette relation, s’attarde sur le personnage d’Ava, terriblement séduisante mais toujours insaisissable. Quand la liaison amoureuse entre Ava et le narrateur enfin s’achève, commence une autre histoire, presque un autre livre, bien moins conventionnel et plus intéressant. D’amante, Ava devient amie et complice, et débarrassé du thème un peu encombrant des tourments de l’amour,  le style de l’auteur semble enfin se libérer, se déployer: “A mes proches je présentais Ava comme ” ma plus ancienne, ma plus fidèle amie”. Et parce qu’il m’amusait de la voir arrondir ses prunelles à la face du ciel, je ne manquais jamais d’ajouter en me tournant vers elle: eh oui tu te rends compte? Ca fait plus de vingt ans qu’on se connaît…”. Ava ne réalisait pas. Moi non plus. Ces vingt ans qui prenait trois secondes pour les dire et filaient en points de suspension, c’était finalement le bon rythme, la bonne ponctuation. Nos premiers mots prononcés à la Sorbonne n’en finissaient pas. Ava et moi: une phrase ininterrompue qui charriait gens, livres, voyages, aventures…Tous ces moments passés ensemble palpitaient encore dans l’onde de nos voix, de nos rires, à la terrasse des cafés, dans les rues, au bout du fil au milieu de la nuit. Nous aurons tout partagé, sauf des souvenirs. Les souvenirs c’était de la fausse monnaie, des hochets pour les mourants”. Et puis Ava disparaît, et le narrateur, privé de son ancre, semble partir à la dérive. Comment accepter d’être ainsi amputé d’une partie de lui même? Les 30 dernières pages sont d’une déchirante sincérité, bien loin du début du roman, qui m’avait paru un peu figé et étriqué. C’est finalement à travers la perte, la soudaine absence, qu’enfin on saisit pleinement le lien si particulier qui unissait Ava et le narrateur. Même si “Les aimants” ne révolutionnera pas la rentrée littéraire, il mérite un détour, juste pour ces quelques pages particulièrement touchantes.

Editions Stock 2009, 100 pages, 13,50€


Ce blog a décidé de s’associer à un projet ambitieux : chroniquer l’ensemble des romans de la
rentrée littéraire !

Vous retrouverez donc aussi cette chronique sur le site Chroniques de la rentrée littéraire qui regroupe l’ensemble des chroniques réalisées dans le cadre de l’opération. Pour en savoir plus c’est ici.


L’orgue de Quinte (L’Arcamonde 2) – Hervé Picart

Frans Bogaert a quitté Bruges et sa boutique d’antiquités (laissée aux bons soins de son assistante Lauren), pour rendre visite à son beau-père, Victor Brunel, dans la petite ville française de Provins. C’est lors d’une brocante locale qu’un objet mystérieux attire son attention: il s’agirait selon son propriétaire de l’orgue à liqueurs de Des Esseintes, décrit par Huysmans dans son roman le plus célèbre, A rebours. Mais notre antiquaire flaire bien vite l’arnaque et part à la recherche des véritables origines de cet orgue énigmatique.

Deuxième enquête de Frans Bogaert après Le dé d’Atanas, et on a déjà l’impression de retrouver un vieil ami! Petite déception pourtant en ouvrant le livre, nous voilà bien loin de l’Arcamonde (sa petite boutique brugeoise) et de son ambiance particulière qui m’avait tant séduit dans le premier tome. Mais on ne perd finalement pas au change en passant quelques jours dans la maison du beau-père de Frans, “la maison Lamartine” (surnommée ainsi parce que le poète y aurait séjourné), tenue par une vieille dame revêche, Dame Corneille. On s’installe confortablement dans un salon à la lumière tamisée avec un verre de vin de glace, pendant que la pluie frappe les carreaux,  pour entendre l’étrange histoire d’un maitre verrier poursuivant d’incroyables chimères… L‘excellente impression que m’avait laissé le premier tome est ici confirmée: encore une fois Hervé Picart déroule une enquête minutieuse, chic et intelligente, flirtant avec le conte fantastique, sans jamais céder à la facilité et à l’air du temps. J’attends évidemment avec impatience la troisième aventure de notre antiquaire, “Le-Coeur-de-Gloire“, annoncée pour le 5 novembre.


Le Castor Astral 2009, 213 pages, 13€
“Un rendez vous incontournable” pour  Clarabel!

L’histoire d’Edgar Sawtelle – David Wroblewski



Edgar est né muet aux début des années 60, dans le nord du Wisconsin. Malgré son handicap il mène une existence paisible et heureuse auprès de ses parents, Trudy et Gar, avec qui il communique grâce au langage des signes. Tous les trois consacrent l’essentiel de leur temps à l’élevage de chiens qui fait la fierté familiale depuis plusieurs générations. Mais le retour de son oncle Claude, qui entretient une relation très conflictuelle avec le père d’Edgar, va bouleverser l’équilibre familial et le destin du jeune garçon.


Sélectionné par la prêtresse de la télé américaine, Oprah Winfrey, L’histoire d’Edgar Sawtelle a été un vrai phénomène littéraire aux Etats Unis, a emballé les critiques comme les lecteurs (plus de deux millions d’exemplaires vendus), et bien évidemment Hollywood s’est jeté sur les droits… Même si je trouve cette agitation médiatique un peu excessive, et que ce premier roman souffre de quelques défauts (le personnage de Claude et sa relation avec Gar auraient mérité d’être approfondis), j’ai vraiment beaucoup aimé ce livre aux accents shakespeariens (l’histoire d’Edgar n’étant pas sans rappeler celle d’Hamlet). Hymne à la nature, aux grands espaces, à la relation privilégiée entre l’homme et l’animal,  “L’histoire d’Edgar Sawtelle” est un roman à vif, un récit initiatique qui brasse de grands thèmes romanesques, la différence, l’amour filial, la confiance et la trahison… David Wroblewski ne ménage ni ses personnages, ni ses lecteurs et offre ici une tragédie familiale bouleversante, dont certains passages m’ont vraiment chaviré. Si ce n’est pas le chef d’œuvre annoncé, voilà en tous cas un très bon moment de lecture, et ma foi c’est déjà pas mal.


Editions JC Lattès 2009, 595 pages, 22€

Un coup de coeur pour Hathaway, un bon premier roman pour Elfe, Abeille a aimé meme si elle a  trouvé l’ensemble assez inégal,  Jules a abandonné.

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