Catégorie : Lectures – Classement par Genre

La vie devant ses yeux – Laura Kasischke



Un lycéen armé fait irruption dans les toilettes de son établissement, met en joue les deux jeunes filles qui s’y trouvent et leur demandent de choisir celle qu’il va tuer. Changement de décor: Mariée à un professeur d’université, Diana mène une petite vie tranquille dans une banlieue américaine. Elle élève sa petite fille, donne quelques cours, et a le temps de se consacrer à sa passion, la peinture. Mais le drame de son adolescence la rattrape…

Après une première scène choc (celle de la tuerie), il faut avouer qu’on s’ennuie un peu: la description de la vie plan-plan de Diana alterne avec ses souvenirs de lycéenne, les moments passés avec son amie Maureen. Mais soudain l’existence bien réglée de Diana se met insidieusement à dérailler et l’angoisse monte… Devient elle folle? Quelqu’un veut il lui rappeler un épisode sombre de son passé?  “La vie devant ses yeux” est un roman troublant et déroutant, et pour l’apprécier il faut accepter de ne jamais maîtriser  complètement le récit: Les allers-retours dans le temps, les ellipses, l’ambiguïté du personnage, une fin brumeuse, l’auteur ne nous donne pas toutes les clés et entretient la confusion chez le lecteur. J’aime décidément beaucoup l’univers de Laura Kasischke, sa façon de faire exploser les apparences de la middle-class américaine, à mi-chemin entre l’étude de moeurs, le thriller et le fantastique. J’ai déjà deux autres romans de Laura Kasischke dans ma PAL  (A moi pour toujours, et son petit dernier, La couronne verte) alors vous n’avez pas fini d’entendre parler de cet auteur sur ce blog!

Points 2003, 7€, traduction d’Ann Wicke. Lu par Laurence, Joëlle, Céline, et vous trouverez aussi l’avis de Clarabel
sur
Amazon.
Ce roman a récemment été adapté au cinéma, avec Uma Thurman & Evan Rachel Wood.
Voir la bande annonce.


*****


A lire aussi: Rêves de garçons de Laura Kasischke.

Trois pom-poms girls insousciantes et arrogantes, en camp de vacances, partent pour une virée en décapotable. Leur rencontre avec deux garçons du cru bouleversera leurs vies à jamais. Un roman inattendu et féroce sur la cruauté du destin, cauchemars garantis!

Lus en 2008 – Romans français

Attention, rafale de critiques express: histoire de
bien démarrer 2009, je fais table rase de 2008 en vous parlant rapidement de livres lus cette année et que j’avais passés sous silence par manque de temps ou d’inspiration! Je commence
par les romans français.



Dans le creux de
ta main de Michèle Reiser

Un homme et une femme, chabadabada. Enfin plutôt blablabla en l’occurrence. Marie revoit Baptiste, et
c’est le coup de foudre. Marie est mariée, Baptiste a un emploi du temps surchargé, ils entament donc une relation en pointillé, dans laquelle les SMS vont prendre beaucoup de place…
Allez, ce n’est pas si mal écrit, mais le sujet est d’une banalité affligeante et l’auteur n’a pas réussi à me convaincre que le SMS pouvait représenter un quelconque intérêt
littéraire.  Pour en savoir plus, je vous renvoie au commentaire de
Frank Bellucci qui qualifie ce roman de “Titanic littéraire”. Pas mieux.
(Albin Michel).



La mère qui voulait être femme de Maryse Wolinsky


Une jolie saga familiale qui raconte l’histoire de 3 générations de femmes: Il y a Marta, une ancienne
violoniste qui fête ce soir ses 90 ans et qui a jadis abandonné sa famille. Sa fille Cécile, qui cherche desespérément l’approbation et l’amour de sa mère, et qui malgré la froideur de celle-ci,
est bien décidée à lui organiser une belle soirée pour son anniversaire. Et puis il y a la fille de Cécile,  l’impulsive et colérique Esther, elle aussi violoniste, qui rentre tout
juste d’une mission humanitaire. Un récit émouvant autour d’un secret de famille, qui met en lumière la complexité des rapports entre mère et fille. (Seuil)



Les petits sacrifices de Caroline Sers


1914, comme chaque année, la famille Dutilleul organise sa grande fête de l’été.  La sévère Marie,
mariée à Henri, élève d’une main de fer ses 4 enfants: Pierre, qui vient de se fiancer, Fabrice qui a du mal a trouver sa place, la discrète Geneviève, et la benjamine, Charlotte. Personne ne le
sait encore mais dans quelques heures leur petit monde sera définitivement bouleversé: l’honneur de la famille sera terni par un double drame survenu pendant la réception. Les cent
premières pages sont très accrocheuses avec cette atmosphère de fin du monde, cette menace indéfinissable qui plane au-dessus de la famille. Malheureusement l’auteur a ensuite
choisi de passer sous silence un grand laps de temps (plusieurs années),  un choix assez déstabilisant pour le lecteur. Le reste du roman m’a du coup paru moins intense, plus froid, et
j’ai eu du mal à m’attacher à des personnages qui ont beaucoup changé en quelques pages… Malgré une petite déception donc, ce roman m’a quand même donné envie de lire d’autres titres de
Caroline Sers! (Buchet Chastel)


Lu aussi par
Cuné (ne lisez pas les commentaires à la
suite du billet, un lecteur  y révèle toute l’histoire!).


La porte des enfers de Laurent Gaudé

1980, Matteo, chauffeur de taxi, vit à Naples avec son épouse Guliana, femme de chambre dans un hôtel. En
retard pour déposer à l’école son petit garçon Pippo, Matteo court dans les rues de Naples ce matin-là, quand soudain une fusillade éclate : Pippo ne se relèvera pas. Ses parents réagiront
au drame de façon différente : Alors que Matteo erre dans les rues de Naples toutes les nuits rongé par la tristesse et la culpabilité, Guiliana le supplie d’aller chercher son fils ou de le
venger. Laurent Gaudé n’évite pas toujours les lourdeurs et les maladresses dans ce roman (la description des enfers, un peu kitsch, ou les longs monologues de la mère de Pippo par
exemple). Mais l’extrême sensibilité des personnages et l’atmosphère de Naples au creux de la nuit font oublier les défauts du récit.  “La porte des enfers”  est un conte noir mais
touchant sur l’amour filial et sur notre rapport à la mort. (Actes Sud)


Lu aussi par
Dda, Amanda et Papillon.

Ailleurs – Julia Leigh

Fuyant l’Australie et un conjoint violent, une femme accompagnée de deux jeunes enfants trouve refuge en France, dans la demeure où elle a passé son enfance. Elle débarque de façon impromptue dans une maison en pleine effervescence, sa mère attendant le retour de la maternité de sa belle-fille Sophie et de Marcus, son mari. Quand le couple arrive enfin, l’heure n’est malheureusement plus aux réjouissances: l’enfant est mort-né, mais Sophie refuse de s’en séparer.

Ailleurs est un huis-clos etouffant, une bulle hors du temps dans laquelle les personnages semblent errer comme des ombres… Bien qu’on connaisse le prénom de la jeune femme, elle sera presque toujours désignée simplement comme “la femme“: Ses bleus, son bras en écharpe, cet homme qu’elle fuit semblent l’avoir vidée de toute substance. Les autres personnages ne semblent pas plus vivants, surtout Sophie, la belle-soeur qui se refuse à enterrer son bébé, qui ne quitte plus ce “paquet” morbide sauf quand elle se laisse convaincre de le mettre au congélateur (gloups). L’atmosphère est froide et lugubre, saturée de non-dits, les scènes absurdes s’enchaînent ainsi jusqu’à l’écoeurement. Seuls les deux enfants de la femme qui tentent confusément d’échapper au désespoir des adultes, insufflent un semblant de vie dans ce tableau… Je comprends que de nombreux lecteurs aient pu être séduits par ce récit atypique et maîtrisé, au style très épuré, mais sa noirceur m’a mise trop mal à l’aise pour que je puisse vraiment l’apprécier!

Christian Bourgois 2008, 15€

Elles ont aimé: Lily, Papillon, Cathe, Anna Blume, Sylvie, Chiffonnette mais Kathel et Bellesahi
sont plus mitigées.

Un brillant avenir – Catherine Cusset



Née en Roumanie dans les années 40, Helen a reçu une éducation très stricte, et sa vie ressemble à un combat ininterrompu: Elle s’est d’abord battu pour épouser Jacob, l’amoureux juif dont ses parents ne voulaient pas, s’est battu encore et toujours pour quitter son pays natal, puis pour trouver sa place aux Etats-Unis. Elle s’est surtout battu pour que son fils Alexandru ait “un brillant avenir”. Alors quand ce dernier tombe amoureux de Marie la petite française, Helen reprend les armes pour évincer l’intruse et préserver l’unité familiale.

L’histoire d’Helen se construit comme un puzzle, au fil des pages et des allers-retours dans le temps. De la Roumanie de Ceaucescu à l’Amérique des années 2000, en passant par Israël ou l’Italie, son parcours est plutôt chaotique! Intelligente et déterminée, courageuse et travailleuse, toute sa vie elle saura forcer le destin et imposer ses choix… Mais le personnage nous échappe parfois, Helen est facilement déstabilisée, dévorée par ses peurs et ses sentiments: Terrifiée à l’idée que sa belle-fille puisse bouleverser l’équilibre familial qu’elle a si patiemment construit, elle lui refuse son affection, et elle engage contre Marie une guerre mesquine, faite de reproches silencieux et de petites vexations. J’ai parfois eu du mal à comprendre le comportement excessif d’Helen envers sa belle-fille mais j’ai aimé qu’elle se révèle finalement une femme comme les autres, avec ses failles et ses doutes, ses défauts et ses contradictions. Un brillant avenir est un très beau portrait de femme!

Gallimard, 369 pages, 21€.

Lu par Cuné et Essel.

On s’y fera – Zoya Pirzad


Divorcée, Arezou vit seule avec sa fille Ayeh à Téhéran et dirige une petite agence immobilière léguée par son père. Femme active et indépendante, elle se laisse pourtant mener
par le bout du nez par sa fille adolescente, qui rêve de retourner vivre en France auprès de son père. Arezou entretient aussi des relations difficiles avec sa mère, Mah-Mounir, très soucieuse du
qu’en-dira-t-on. Quand Arezou tombe amoureuse d’un client de son agence, Zardjou, ses relations avec son entourage vont se compliquer encore un peu plus…


Arezou est bien loin du stéréotype de la femme iranienne : Dans cette société pourtant très machiste
elle a réussi à s’affranchir de toute autorité masculine, et mène une brillante carrière professionnelle. On en oublierait presque dans quel pays le roman se déroule: hormis l’ambiance
particulière (très “nourrissante” !) et quelques anecdotes ici et là (la présence furtive de la police des mœurs ou le bus séparé en deux parties, l’une réservée aux hommes, l’autre aux femmes),
l’histoire d’Arezou est finalement assez universelle: celle d’une femme qui à la quarantaine tente de refaire sa vie en s’accommodant de bagages un peu encombrants (sa mère et sa fille sont
particulièrement égoïstes et antipathiques). Malgré les possibilités qu’offrait ce sujet, le propos reste malheureusement superficiel et s’éloigne de l’essentiel en se noyant dans les intrigues
secondaires, les détails inutiles ou l’abus de dialogues. On s’y fera est un roman qui se lit vite et bien, pas foncièrement désagréable, mais trop
lisse pour être vraiment captivant.


Le livre de poche, 316 pages, 6,50€
Lu par Sylire, Tamara, Lou, Clarabel, Anne, Fashion, Saxaoul, Praline, Flo, Cathulu, Joelle