Catégorie : Lectures – Classement par note

Magnus – Sylvie Germain

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Franz-Georg, un petit garçon allemand de 5 ans, a perdu la mémoire à la suite d’une forte fièvre. Patiemment, sa mère lui retrace ces années oubliées, reconstruit ses
souvenirs perdus. Inséparable de son ourson élimé prénommé Magnus, Franz-Georg vit ainsi dans un cocon familial dominé par un père un peu distant qu’il admire pourtant sans réserve. Mais la fin
de la guerre 39-45, la défaite de l’Allemagne, la fuite de ses parents vont bouleverser à nouveau l’existence du petit garçon.
La construction du roman, qui joue sur l’alternance entre la vie de Franz-Georg et de courtes séquences (la bio d’un personnage, un poème, etc…), donne un bon rythme
au récit. On suit avec passion la vie chaotique de Franz-Georg, les révélations sur sa famille, sa folle quête d’identité, les nombreux drames qui jalonneront son existence. Le jeune homme, très
attachant, tente de se construire sur des fondations bancales, confronté sans cesse au trou noir de sa petite enfance qui a été comblé à grand coup d’illusions et de mensonges. J’ai
cependant été un peu déçue par la dernière partie du roman, qui sombre dans le mystique et élude les réponses romanesques. Je n’ai pas non plus complètement adhéré au style un peu trop
travaillé de Sylvie Germain, à son écriture un peu froide. Malgré ces quelques réserves, ce roman ambitieux est vraiment très agréable à lire.
Prix Goncourt des Lycéens 2005
Albin Michel 2005, 274 pages, 17.50?

Le 18 – Ludovic Roubaudi

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Grand, le narrateur, effectue son service militaire dans une caserne de pompiers. Avec ses comparses, il est confronté tour à tour à des situations insolites (des
vaches égarées sur le périphérique) ou à des histoires plus graves (une mère désespérée qui jette son enfant du haut d’un escalier). Le quotidien de la caserne est rythmée par les frasques de
personnages haut en couleurs: La Gentiane et son penchant pour la Suze, Malavoie, le chauffeur fort en gueule… Mais cet univers masculin et l’ambiance bon enfant sont profondément perturbés par
l’arrivée d’une femme à la tête de la caserne.
Ce roman léger et plutôt drôle nous plonge dans un univers particulier avec ses codes et son langage souvent fleuri. Le fil principal (la manière dont une femme
devra s’imposer dans un univers macho), use de ficelles un peu caricaturales et attendues, et n’est donc pas le point fort du récit. Mais la vie quotidienne de la caserne, le sens de
l’amitié entre les personnages, les récits ubuesques de leurs sorties permettent de passer un moment agréable. Sous les fanfaronnades des personnages affleurent même parfois des thèmes plus
profonds, et ce roman aborde aussi les situations souvent difficiles que doivent affronter ces héros du quotidien.
2004, Folio, 4.50€
Le blog de Ludovic Roubaudi: http://roubaudi.blogspot.com

L’eau du bain – Pascal Morin

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Un citadin revient passer ses vacances dans le village de son enfance. Son père a enfin cédé, et une piscine remplace désormais le potager du grand-père. Dans un monde
rural fait de sueur et de labeur, ce symbole de l’oisiveté et du plaisir ne semble pas vraiment à sa place. Les vacances s’annoncent cependant parfaites, s’il n’y avait cette petite fille
qui rôde sans cesse autour du narrateur, et lui chuchote comme un inquiétant présage “il va y avoir du malheur”…

Voilà un curieux récit au déroulement inattendu, une lecture qui m’a arraché quelques hoquets de surprise! L’atmosphère de ce roman est troublante, entre la
torpeur d’un Sud écrasé de chaleur, et la fraîcheur hypnotique, obsessionnelle de l’eau. Dans ce huis clos familial et malsain, la fameuse piscine va cristalliser les rancœurs et les secrets de
trois générations d’hommes, et conduira trois frères à signer un pacte tacite et glaçant. Pascal Morin pousse le cynisme et la cruauté très loin, jusqu’au malaise, et en refermant ce roman, je
n’étais pas vraiment sûre de l’avoir aimé!  “L’eau du bain” est en tous cas un roman original et déconcertant, dense et habile, qui bouscule le lecteur.

2004, Babel, 121 pages, 6.50€

Sorties Poches Mars 2006

En mars les fauchés pourront enfin se plonger dans quelques best-sellers de l’année 2004 😉 Sortent en poche ce mois-ci:

Suite française d’Irène Némirovsky – Prix Renaudot 2004 (sortie le 31 mars, Folio)

Les âmes grises
de Philippe Claudel – Prix des lectrices de Elle 2004 (sortie le 1er mars, Le livre de poche)

Le soleil des Scorta de Laurent Gaudé – Prix Goncourt 2004 (sortie le 3 mars, Babel)
L’américain de Franz Olivier Giesbert (sortie le 9 mars, Folio)

Quelques autres sorties à noter:

Une soirée d’Annie Duperey (sortie le 9 mars, Points)
Trois fermiers s’en vont au bal
de Richard Powers (sortie le 2 mars, 10/18)

Daewoo
de Françoi
s Bon (sortie le 1er mars, Le Livre de Poche)

Vous parler d’elle de Claire Castillon (sortie le 8 mars, Le livre de
poche)

Les rochers de poudre d’or
de Natacha Appanah-Mouriquand (sortie le 9 mars, Folio) —> Lire l’avis de Clarabel

Falaises – Olivier Adam


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Un homme d’une trentaine d’années passe la nuit sur le balcon de son hôtel à contempler les falaises d’Etretat. Vingt ans plus tôt s’est
déroulée ici la première des tragédies qui ont jalonnées sa vie: sa mère s’est suicidée en se jetant du haut de ces falaises. Durant cette longue nuit, les souvenirs douloureux refont surface:
Après le drame,  leur père s’est réfugié dans le mutisme et la terreur domestique, tandis qu’Olivier et son frère ont tenté tant bien que mal de se construire…

Le style maîtrisé et envoûtant, sobre et sensible, évite à ce roman de tomber dans le catalogue morbide. L’univers d’Olivier Adam est
vraiment très noir, un monde de silence et de non-dits, de peurs et de violence, de blessures et de fantômes, d’absences et de solitude. Chaque personnage y semble emprisonné dans une bulle de
désespoir…. J’ai été assez touchée par le narrateur: A la fois hagard et lucide, poursuivi par le fantôme de sa mère, il tente de s’accrocher tour à tour à un frère, un amour, une voisine,
qui tous finissent par lui échapper, emportés par leurs propres douleurs. L’ambiguïté entretenue par l’auteur sur la dimension autobiographique rend ce personnage plus troublant encore.
“Falaises” me laisse cependant un sentiment un peu mitigé, ce roman lourd de mélancolie est à la fois bouleversant et etouffant.

Editions de l’Olivier 2005, 206 pages, 18€
Sélection Roman du Grand Prix des Lectrices de Elle 2006