Catégorie : Lectures – Classement par note

La vierge froide et autres racontars – Jorn Riel

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Les rendez-vous du club de lecture des bloggeuses se suivent mais ne se ressemblent pas ! Après l’Inde et ses femmes, nous voilà au Groenland, au milieu d’une petite communauté de chasseurs. Des hommes perdus au bout du monde
qui doivent survivre au quotidien, affronter le climat extrême et l’isolement. Un peu déboussolés par ces conditions de vie, ils deviennent tous un peu dingues, nourrissent des obsessions
curieuses, des amitiés étranges et des amours imaginaires.

 

Un point commun cependant avec la précédente lecture du club, ici encore il s’agit d’un livre à cheval entre le
roman et le recueil de nouvelles. Je n’ai pas été emballée par les premiers récits: un type qui court après le vent, un autre qui s’entiche d’un coq nommé Alexandre, le recueil commence avec des
histoires gentiment décalées mais pas hilarantes. Mais au fil de la lecture, les “racontars” deviennent de plus en plus savoureux et j’ai été en revanche conquise par la deuxième moitié du
livre: Les funérailles trop arrosées de Jalle, la guerre des latrines entre Lause et Siverts ou la passion des chasseurs pour Emma, la fameuse Vierge froide qui donne son titre au livre. Et le
recueil finit en apothéose sur l’incroyable histoire du Roi Oscar, un cochon qui va provoquer une querelle d’anthologie entre Harvor et le vieux Niels. Ma première rencontre avec Jorn Riel est
donc plutôt concluante : si j’ai d’abord eu un peu de mal à entrer dans son univers et que les différentes histoires m’ont parues d’une qualité inégale,  j’ai finalement beaucoup
aimé
son humour fou et grinçant et son sens de l’absurde!

Editions 10/18, 157 pages, 6€

Retrouvez tous les avis chez Sylire

La prochaine lecture du club des bloggeuses : Je, François Villon de Jean Teulé (à lire
pour le 1er mars)

Les vivants et les ombres – Diane Meur (Rentrée littéraire 2007)

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En Galicie, une terre polonaise désormais sous domination autrichienne, une vaste demeure raconte la vie de ses habitants sur plus d’un
demi-siècle. En 1820, Jozef Zemka devient l’intendant du domaine qui appartenait autrefois à sa famille. Bien décidé à récupérer la terre de ses ancêtres, il parvient à ses fins en séduisant
et en épousant la jeune fille de la maison, la douce et naïve Clara. De cette union naîtront cinq filles, au grand dam de Jozef qui souhaitait un héritier.

Ce pavé de 700 pages demande un peu de temps et de concentration: Il y a d’abord un contexte politique et historique assez complexe, mais aussi
un style très riche, et une rigueur qui donne à ce roman des allures de classique. Au cours de ma lecture j’ai souvent pensé à
Dans
la main du diable
d’Anne-Marie Garat, mais alors que j’avais
abandonné le Garat
, le livre de Diane Meur a ce petit truc en plus qui m’a donné envie d’aller jusqu’au bout. J’ai aimé l’ambiguïté de l’atmosphère et du lieu (
cette demeure où se déroule presque tout le roman), à la fois cocon protégé du fracas du monde et huis clos
étouffant
. L’idée de confier la narration à la maison peut paraitre saugrenue mais cela se fait de manière très naturelle et apporte
finalement une vraie profondeur à l’histoire. Elle nous guide dans le labyrinthe des sentiments humains, s’attarde surtout sur les femmes qui habitent en son sein, Clara, ses cinq filles, puis sa
petite fille Tessa. Promises à une même vie terne et étriquée, elles auront toutes un destin très différent et échapperont
à
l’influence du patriarche Jozef grâce à
la passion, la religion, la fuite ou même la mort. Il y a bien quelques longueurs ici et là, mais
Les vivants et les ombres est vraiment une belle fresque familiale, très ambitieuse.

2007, éditions Sabine Wespieser, 711 pages, 29€

Compartiment pour dames – Anita Nair

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Tout vient à point à qui sait attendre, je rends enfin ma copie pour le club de lecture des bloggeuses!

Depuis la mort de son père, Akhila s’est entièrement consacrée au bien-être de sa famille et ne s’est jamais mariée. A 45 ans elle souhaiterait
enfin prendre son envol, mais se heurte à la forte désapprobation de sa sœur, et d’une société indienne qui considère qu’une femme ne peut pas vivre seule. Pour réfléchir à sa situation, elle
part quelques jours dans le sud de l’Inde. Dans le train, elle partage un compartiment avec cinq autres femmes qui vont lui confier leurs propres histoires.

C’est la vie d’Akhila qui sert de fil conducteur au récit, entrecoupée par les témoignages de ses cinq compagnes de voyage. Des femmes
d’âges et de conditions différentes, mariées ou non, qui racontent leur quotidien, leurs drames, la difficulté à concilier le poids des traditions et leurs propres désirs.
Une adolescente confrontée à la mort de sa grand-mère, une femme qui se rend compte à quel point elle déteste son mari, une autre qui se réconcilie avec son
corps grâce à la natation…
Au-delà du thème de l’indépendance, toutes évoquent à leur façon et avec beaucoup de délicatesse
leurs relations avec les hommes,  la séduction, le rapport au corps et la sexualité. Les récits sont tous très différents et vont crescendo, le dernier témoignage étant sans
conteste celui qui a la plus forte dimension dramatique. J’ai un peu regretté que ce livre se présente finalement plus comme une succession de nouvelles que comme un roman à part
entière: j’imaginais qu’un véritable lien allait se créer entre les voyageuses, mais elles ne font finalement que se croiser… Malgré ce petit bémol, j’ai beaucoup aimé ces quelques portraits de
femmes qui dressent un tableau peu reluisant de la condition féminine en Inde.

Picquier poche 2004, 9,50€, 449 pages

***


Retrouvez tous les commentaires des participantes sur le blog de Sylire [Dommage
qu’aucun bloggeur ne se soit prêté au jeu, j’aurais bien aimé lire un avis masculin sur ce roman !]

Le prochain rdv du club de lecture: La vierge froide et autres racontars de Jorn Riel, à lire pour le 1er janvier.

La donation – Florence Noiville (Rentrée littéraire 2007)

A l’occasion d’une donation, la narratrice et sa sœur se retrouvent avec leurs parents dans le bureau d’un notaire de province. Ces retrouvailles familiales et ce don matériel incitent la jeune femme à se retourner sur son passé, ses relations avec ses parents, et à se demander en quoi le trouble maniaco-dépressif dont souffre sa mère a influencé sa propre existence.

A la fin de l’ouvrage, Florence Noiville évoque “un tableau imaginaire” mais il se dégage de son récit une telle sincérité, de tels accents de vérité qu’on a du mal à croire qu’elle ne s’est pas inspiré de son histoire personnelle. Enfin peu importe, réalité ou fiction, elle aborde ici avec beaucoup de pudeur et de délicatesse le sujet de la dépression, et surtout ses effets dévastateurs sur l’entourage. Il y a d’abord les absences de la mère régulièrement hospitalisée, ou sa présence qui s’avère parfois plus terrible encore, et un père dépassé, absorbé par la maladie de sa femme. Les sentiments se bousculent,  l’incompréhension, l’amour, la colère, l’impuissance, la culpabilité insidieuse, et la peur surtout. La terreur de celle qui est devenue mère à son tour et qui se demande à quel point ce fardeau familial aura un impact sur ses propres filles, si la transmission se fera ainsi de génération en génération comme un héritage maudit. Mais à l’âge de la maturité, est il temps de comprendre, d’accepter, de pardonner? La donation est un texte intimiste et sombre, pas le genre de récit dont je suis friande d’habitude, mais ici j’ai vraiment été séduite par la sensibilité du propos et la pureté de l’écriture.

Editions Stock 2007, 13€, 126 pages/

Le journal d’Asta – Ruth Rendell

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Au début du 20ème siècle, Asta Westerby, une jeune mère d’origine danoise, émigre en Angleterre pour satisfaire les ambitions
de son mari. Pour tromper sa solitude dans ce pays inconnu, elle commence à tenir en secret un journal intime. Après sa mort, sa fille Swanny fait publier ce journal qui deviendra un
best-seller… Mais c’est à Ann, sa petite fille, que reviendra la lourde tâche de faire la lumière sur des points obscurs de la vie d’Asta : Swanny était elle réellement sa
fille ?

Quand j’ai établi ma liste pour le challenge ABC 2007 (bien mal en point soit dit en passant), j’ai choisi pour la
lettre R un livre qui était déjà dans ma PAL, Vera va mourir de Ruth Rendell. Mais je n’ai pas pu m’empêcher d’aller fouiller dans les rayons de ma médiathèque et je
suis finalement reparti avec cet autre titre de Rendell, sorti en 1994.

Les extraits du journal intime d’Asta (qui court du début du siècle jusqu’aux années 60) sont sans conteste les passages les plus intéressants de ce roman: S’y dessine le portrait d’une femme
exceptionnelle, une forte tête qui ne fait pas dans le politiquement correct, toujours en décalage avec son époque, son pays, les attentes de son entourage. Et la certitude qu’elle cache un
terrible secret donne encore une dimension supplémentaire à ce personnage atypique. Le roman aurait en revanche gagné en intensité sans la quasi-omniprésence d’Ann, la petite fille d’Asta, à la
personnalité fade et à l’existence insipide. Les tours et détours qu’elle entreprend avant de découvrir le secret de sa grand mère m’ont parus interminables, et delayent le suspens au lieu de
le renforcer. Impression mitigée donc, même si j’ai passé plutôt un bon moment avec ce livre. J’ai lu ici et là que ce roman n’était pas représentatif de l’oeuvre de Ruth Rendell, je lirais
donc certainement un autre titre pour me faire une idée plus précise de cet auteur.

Le livre de poche, 471 pages, 6,50€