Catégorie : Lectures – Classement par note

La chambre des morts – Frank Thilliez



Vigo et Sylvain, deux informaticiens au chômage, renversent un homme au beau milieu d’un champ d’éoliennes. A côté du cadavre, deux millions d’euros dont les deux amis s’emparent avant de faire disparaître le corps. Le lendemain, une fillette est retrouvée morte près des lieux de l’accident: l’argent était il destiné à payer sa rançon?

Dans le duel classique entre le flic et le psychopathe s’immiscent ici deux paumés qui vont bousculer l’ordre des choses… L’occasion pour l’auteur de révéler la part d’ombre des gens ordinaires. Sur un rythme haletant, ce roman invite le lecteur à une plongée macabre dans l’horreur et la folie (âmes sensibles s’abstenir!). Au cœur des paysages ravagés du Nord de la France, l’intrigue oppressante prend vraiment le lecteur à la gorge. “La chambre des morts” est un excellent thriller qui montre que, tout en préservant une forte identité régionale, les auteurs français peuvent rivaliser dans ce domaine avec les anglo-saxons.

Editions Le Passage 2005, 311 pages, 15€
Retrouvez Frank Thilliez sur www.auteursdunord.com

Sélection Polar du Grand Prix des Lectrices de Elle 2006

De chair et de sang – John Harvey



Ancien inspecteur, Frank Elder passe une retraite morose dans un coin retiré des Cornouailles, le plus loin possible de son passé, et notamment de son ex-femme. Un cauchemar récurrent le renvoie sans cesse à une affaire non résolue, la disparition d’une adolescente. La remise en liberté du principal suspect, Shane Donald, condamné pour le meurtre d’une autre jeune fille, pousse Elder à reprendre progressivement l’enquête.

Ce polar est le premier volume de ce qui sera une série, construite autour du personnage de Frank Elder. A l’image de ce vieux loup solitaire et désabusé, “De chair et de sang” est un roman policier plutôt classique. Face à Elder, Shane Donald est quant à lui un personnage ambigu, toujours sur le fil: N’est-il qu’un gamin malmené par la vie, un adolescent influençable que la prison a remis sur le droit chemin? Ou un dangereux pervers prêt à basculer de nouveau dans la folie criminelle? John Harvey joue avec les apparences… Grâce à une intrigue efficace et un rythme savamment entretenu par les rebondissements et les accélérations, “De chair et de sang” est un roman sans temps mort qui ne vous laisse pas le temps de souffler. Un bon polar!

Rivages 2005, 366 pages, 20.99€
Sélection Prix Elle 2006

Si vous avez aimé ce roman, vous aimerez La colline des chagrins de Ian Rankin

La route de tous les dangers – Kris Nelscott


1968, la tension est grande à Memphis: une grève paralyse la ville et nous sommes à quelques semaines de l’assassinat de Martin Luther King. C’est dans ce contexte orageux que Smokey Dalton, un détective noir, reçoit la visite de Laura, une jeune femme blanche qui cherche à comprendre pourquoi sa mère lui a légué une importante somme d’argent. Smokey se retrouve alors sur la piste de son propre passé et de la mort brutale de ses parents.

“La route de tous les dangers” pioche dans plusieurs genres, à la fois polar, roman noir, chronique sociale, épisode historique… Ce roman original nous replonge dans une communauté afro-américaine en pleine crise: le racisme quotidien et la cohabitation difficile avec la population blanche, la violence des quartiers défavorisés, les positions radicales des Blacks Panthers, la figure malmenée de Martin Luther King. La fiction se mêle habilement à la réalité, et le personnage principal , qui s’interroge sur le rôle qu’il doit jouer dans sa communauté, se retrouvera un peu malgré lui pris dans la tourmente de l’histoire. Seul bémol, des dialogues trop présents alourdissent un peu le style et ralentissent inutilement l’intrigue. Mais que cela ne vous décourage pas de lire ce roman qui nous éclaire sur un tournant décisif de l’histoire des Etats-Unis, tout en offrant un très bon moment de détente.

Editions de l’aube, 378 pages, 21€
Sélection Polar Grand Prix des lectrices de Elle 2006

Ambiguïtés – Elliot Perlman


Simon, un instituteur au chômage, est obsédé par son ex-petite amie, désormais mariée et mère de famille. Un jour, il enlève le fils de celle-ci à la sortie de l’école. Sept personnages touchés de près ou de loin par cet événement se passent le relais pour relater les circonstances et les conséquences de l’acte fou de Simon: Angélique, prostituée au grand cœur, Simon lui-même, qui découvre l’univers de la prison, Joseph, le trader qui raconte le naufrage de son mariage ou encore le psychiatre Alex  qui explique son attachement pour le kidnappeur. Leurs différents points de vues composent une mosaïque de réalités, la vérité de chacun s’habillant de sa subjectivité, de ses peurs ou de quiproquos.

Je suis bien moins enthousiaste que le magazine Lire qui a classé ce roman australien dans les 20 meilleurs livres de l’année. Certes, le style est agréable, la structure complexe est parfaitement maîtrisée, la psychologie des personnages très travaillée.  L’auteur construit avec habileté 7 romans en un seul, chaque personnage nous entraînant dans son univers. Mais en dépit de qualités formelles indéniables, ce roman-fleuve m’est souvent tombé des mains! Ma patience a été vaincue par une intrigue plutôt mince, des digressions interminables et un rythme excessivement lent. Comme le souligne la quatrième de couverture, il y a une ressemblance certaine avec “Les corrections” de Franzen, que j’avais abandonné en cours de route…

Editions Robert Laffont 2005, 645 pages, 23 € (sortie poche en février 2006)
Sélection Roman Grand Prix des lectrices de Elle 2006

Les cerfs-volants de Kaboul – Khaled Hosseini


Dans l’Afghanistan encore paisible des années 70, Amir et Hassan passent une enfance heureuse. Bien qu’ils appartiennent à deux castes différentes (Amir est le fils du maître Pachtoune et Hassan le fils du domestique Hazara), les deux enfants sont inséparables. Prêt à tout pour attirer l’attention d’un père méprisant, Amir tournera pourtant le dos à Hassan quand celui-ci aura le plus besoin de lui. Rongé par la culpabilité, il ne trouvera l’occasion de se racheter que bien des années plus tard…

Khaled Hosseini mêle le charme du conteur oriental à l’efficacité du romancier anglo-saxon dans ce récit initiatique aux thèmes universels, l’amitié, la loyauté et la trahison. On hésite entre compassion et agacement pour Amir, personnage ambigu, à la fois pathétique dans sa faiblesse et désarmant dans sa culpabilité.

Ce roman est aussi un formidable document sur la culture et l’histoire afghanes. L’auteur apporte un point de vue intimiste – et sans doute en grande partie autobiographique – sur ce pays vers lequel tous les regards se sont tournés au lendemain du 11 septembre 2001: Les ravages de la guerre avec les soviétiques, le régime de terreur instauré par les Talibans, mais aussi les affres de l’exil et la façon dont la communauté Afghane s’organise aux Etats-Unis. Une réussite!

Editions Belfond 2005, 383 pages, 20€
Sélection Roman du Grand Prix des lectrices de Elle 2006