Rentrée Littéraire 2017 : Mes lectures (1)

Un certain M. Piekielny de François-Henri Désérable

 “Quand tu rencontreras de grands personnages, des hommes importants, promets-moi de leur dire : au n° 16 de la rue Grande-Pohulanka, à  Wilno, habitait M. Piekielny…” Qui était donc ce voisin de Romain Gary quand il était enfant, cette souris grise citée dans La Promesse de l’aube,  et qui lui avait fait promettre de parler de lui à tous les grands de ce monde ? Quel fut son destin après le départ de Gary pour la France ?  C’est une enquête minutieuse autour de ce personnage que commence alors l’auteur, mais un peu vaine… il existe si peu d’informations sur ce M. Pielkielny qu’on peut se demander si Gary ne l’a tout simplement pas inventé. Cela n’arrête pas F.H. Désérable, qui imagine alors quelle pouvait être la vie d’un juif entre les années 20 et les années 40 à Vilnius, retrace par petites touches la vie de Romain Gary, nous parle de sa fascination pour la Promesse de l’aube, de ses propres errances dans Vilnius, des coins et des recoins dans lesquels l’ont mené ses recherches. C’est un peu foutraque, entre la biographie, le témoignage et le roman, mais ce livre est vraiment un bijou de culture, de légèreté, de finesse et de fantaisie, j’ai beaucoup aimé !

Editions Gallimard, août 2017, 272 pages – Cliquez pour acheter


 

David Bowie n’est pas mort de Sonia David

J’avoue que je m’attendais à une chronique familiale (à cause de la couverture) dans les années 70 (à cause du titre). Rien à voir. De nos jours,  la narratrice d’une cinquantaine d’années est confrontée tour à tour à la mort de sa mère, avec qui elle entretenait des rapports conflictuels, puis de son père, éternel malade dont elle avait fini par croire qu’il était invincible. Avec ses trois sœurs, il faut alors que chacune se recompose au sein de la fratrie. Un livre sur le deuil, plutôt bien écrit, mais j’avoue que le thème ne m’a pas vraiment touché. Erreur d’aiguillage.

Editions Robert Laffont, août 2017, 180 pages  – Cliquez pour acheter

 


 

La nature des choses de Charlotte Wood

Une dizaine de femmes est enfermée au milieu du désert australien, sous la surveillance de deux hommes, dans ce qui pourrait ressembler à un asile ou une prison. Il y a une star de la télé-réalité, la maîtresse d’un homme politique, une nageuse qui a dénoncé les abus sexuels de son entraîneur… Pourquoi sont-elles là ? On ne le saura jamais vraiment. Leurs geôliers leur rasent la tête, les attachent, les obligent à travailler de longues heures, les enferment chaque nuit. Mais peu à peu leurs gardiens eux-mêmes doivent se rendre à l’évidence, personne ne viendra les chercher, et les vivres viennent à manquer. Les rôles de chacun vont alors insensiblement changer…  Un huis-clos oppressant et angoissant, et dont le thème résonne particulièrement dans le contexte actuel de #metoo et de #balancetonporc, mais je n’ai pas aimé le côté caricatural des personnages : Les hommes sont forcément de pauvres types que le pouvoir rend lâches, la plupart des femmes sont de vraies cruches, réduites à leur potentiel d’objets sexuels, et même quand elles auront la chance de prendre leur destin en main, pour la majorité d’entre elles le naturel reviendra vite au galop.  Selon l’éditeur une adaptation cinématographique est prévue mais je n’ai pas trouvé plus d’informations à ce sujet.

Editions du Masque, septembre 2017, 288 pages – Cliquez pour acheter

 

Mes lectures de l’été

La voix secrète de Michaël Mention

Pierre-François Lacenaire “poète-assassin” du début du 19ème, se fit connaître aussi bien par ses crimes (il fut guillotiné en 1836) que par ses écrits, mémoires et poèmes. Ce livre qui mêle histoire et fiction se déroule juste avant son exécution alors qu’il est enfermé à la prison de la Santé et qu’un autre assassin tue des enfants dans les rues de Paris en imitant sa “patte”. La police va devoir recourir à l’aide du poète pour arrêter le nouveau meurtrier, entre répugnance et fascination. J’ai trouvé l’intrigue assez secondaire mais j’ai apprécié d’en apprendre plus sur la figure de Lacenaire, et sur le contexte politique de l’époque, les Républicains tentant de mettre à terre le pouvoir de Louis-Philippe en commettant des attentats sanglants dans la capitale. (Editions 10/18 Collection Grands détectives – janvier 2017 – 240 pages – clic)

Juliette : Les fantômes reviennent au printemps de Camille Jourdy

J’avais adoré la série Rosalie Blum  du même auteur (adapté  sur grand écran par Julien Rappeneau,  avec Kyan Khojandi et Noémie Lvovsky), Juliette est dans la même veine, on y suit une jeune parisienne angoissée et hypocondriaque qui revient dans la ville de province dans laquelle elle a grandi. Elle y retrouve son père solitaire, sa mère en plein trip new age,  sa sœur aîné qui trompe son mari dans la serre au fond du jardin… Difficile de se (re)construire au sein de cette famille dysfonctionnelle ! On retrouve ici le même type d’univers que dans Rosalie Blum, délicat et sensible, Camille Jourdy sait saisir avec une jolie finesse la beauté et l’épaisseur des existences ordinaires. (Actes Sud éditions – Février 2016 – 240 pages – clic)

Les furies de Lauren Groff

Lotto et Mathilde sont jeunes, beaux, charismatiques, amoureux, il veut devenir comédien, elle travaille dans une galerie d’art, ils forment un couple parfait et fusionnel.  Mais connaît-on jamais vraiment la personne qui partage notre vie ? Le livre est construit sous forme de diptyque,  la 1ère partie est racontée du point de vue de Lotto, la 2ème du point de vue de Mathilde. Les furies les suit pendant toute une vie, entre petits secrets et grandes trahisons, désirs et frustrations. J’ai aimé l’ambiance feutrée et cruelle de cette autopsie d’un couple, même si je me suis parfois un peu perdue dans quelques longueurs. (éditions de l’Olivier – Janvier 2017 – 432 pages – clic)

Good Morning, Midnight de Lily Brooks-Dalton

L’un des livres de ma PAL de l’été et incontestablement mon coup de cœur de ces derniers mois. August, astronome reconnu, finit sa carrière en arctique lorsque la base est brutalement évacuée. Resté seul, il découvre une petite fille dans un dortoir, et tente de joindre la civilisation afin que quelqu’un vienne la récupérer mais plus personne ne répond. Sully, jeune astronaute revient quant à elle avec son équipage d’une longue mission de 2 ans dans l’espace, et tente elle aussi en vain de joindre la Terre. Que s’est-il passé ? Plus qu’un énième récit apocalyptique,  Good morning, midnight est l’histoire de 2 solitudes qui cheminent côte à côte dans un silence étourdissant, à l’image de la citation de T.S. Eliot cité en exergue : Et ainsi prend fin le monde, non dans une explosion, mais dans un murmure. Prenant et émouvant. (Presses de la Cité – janvier 2017 – 272 pages – clic)

L’amie prodigieuse (Tome 1) d’Elena Ferrante

J’ai enfin pris le temps de lire le 1er tome de cette série, et comme tout le monde ou presque, j’ai beaucoup aimé. Elena et Lila grandissent dans les quartiers pauvres de Naples dans les années 50. Poussée par son institutrice Elena continuera ses études, alors que les parents de Lila refuseront de l’inscrire au collège. Les chemins des deux amies prendront alors deux directions très différentes. Un très beau roman d’amitié et d’apprentissage dans une Italie en pleine mutation, avec une grande part accordée à l’importance de l’éducation, des livres qui vont permettre à la narratrice de s’élever au-dessus de sa condition et de s’ouvrir au monde, mais aussi à la culpabilité que cela engendre par rapport à son milieu d’origine (Folio – janvier 2016 – 448 pages – clic)

Vernon Subutex (Tome 1) de Virginie Despentes

Ancien disquaire, Vernon Subutex se retrouve à la porte de chez lui, et va devoir se faire héberger par quelques connaissances surgies du passé. Sa seule richesse est désormais une série d’interviews d’Alex Bleach, chanteur à succès qui vient de mourir d’une overdose dans la baignoire d’un hôtel. Autre série qui squatte le rayon des best-sellers depuis un moment déjà, et pourtant j’ai été franchement déçue par ce 1er tome. Pas vraiment d’histoire mais un prétexte pour égréner une galerie de personnages en marge, drogués, acteurs pornos, bourgeoise hystérique, cinquantenaire frustré, transsexuelle, mari violent, SDF, nazillons… “Magistral et fulgurant” claironne François Busnel sur le bandeau de couverture (François, françois, tsss, vraiment). Pour ma part j’ai trouvé que Virginie Despentes jouait surtout sur la corde d’un trash peu inspiré et bourré de clichés. La suite ce sera sans moi. (Le livre de poche – mars 2016 – 432 pages, clic)

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Ma Pile à Lire Eté 2017

Je ne suis pas très présente ces derniers temps mais avant les vacances j’avais envie de partager avec vous ma Pile à Lire de l’été. Je glisserai donc dans mes valises (vous pouvez cliquer sur les titres pour en savoir plus) :

Des romans familiaux, mon genre de prédilection pendant la période estivale. Les filles au lion de Jessie Burton (auteur de “Le miniaturiste”), Une bobine de fil bleu d’Anne Tyler (finaliste du Man Booker Prize en 2015), Assez de bleu dans le ciel de Maggie O’Farrell (un auteur qui ne me déçoit jamais), Les Mandible : Une famille, 2029-2047 de Lionel Shriver (auteur du best-seller Il faut qu’on parle de Kevin, adapté au cinéma), No home de Yaa Gyasi (qui se passe entre le Ghana et l’Amérique au 18e siècle) et Belgravia de Julian Fellowes (qui vient de sortir en poche).

 

Un peu d’imaginaire aussi avec Le purgatoire de Chuck Palahniuk (Après sa mort, une jeune fille de 13 ans revient sur Terre et va tenter de comprendre pourquoi elle s’est retrouvée en Enfer), Good morning, Midnight de Lily Brooks-Dalton (le dialogue entre un scientifique isolé en Arctique et une jeune femme astronaute qui ne parvient plus à reprendre contact avec la Terre), Dans la forêt de Jean Hegland (la survie de 2 sœurs en pleine forêt alors que la civilisation s’effondre), et Le sommeil des géants de Sylvain Neuvel (1er tome de la trilogie Les dossiers Thémis, entre World War Z et Seul sur Mars promet la couverture !)

Les premiers tomes de séries que je me promets de lire depuis longtemps : L’amie prodigieuse de l’italienne Elena Ferrante, Vernon Subutex de la sulfureuse Virginie Despentes, et le 1er volume de la série jeunesse Le Passe-Miroir (Les fiancés de l’hiver) de Christelle Debos.

Avec un peu d’avance (de l’avantage d’être blogueuse !) je vais aussi lire certains titres de la Rentrée Littéraire en commençant par La maison des Turner d’Angela Flournoy (sortie le 31 août aux éditions Les escales).

Et puis j’espère que j’aurais aussi le temps de lire au moins un polar (peut-être Au fond de l’eau de Paula Hawkins, auteur de La fille du train que j’avais bien aimé), et un ou deux classiques (Les années de Virginia Woolf, et un des romans de Barjavel que j’ai envie de (re)lire depuis longtemps).

Et vous, quel est votre programme de lectures pour cet été ?

Chance – Kem Nunn [Roman]

Chance Kem NunnLe Dr Eldon Chance est un neuropsychiatre d’une cinquantaine d’années qui vit à San Francisco. Son activité consiste à évaluer des patients pour livrer son expertise auprès des tribunaux. Sa vie personnelle est un naufrage, sa femme vient de le quitter pour un jeune coach sportif, le divorce l’a mis sur la paille, et il ne peut plus payer l’école privée de sa fille ado, avec qui il tente tant bien que mal de maintenir une relation. Face à sa situation financière délicate il est tenté par la magouille d’un antiquaire qui lui propose de vendre quelques-uns de ses meubles bien au-dessus de leur valeur réelle. Tout comme il est tenté par Jacklyn Blackstone, une de ses patientes. A moins que ce ne soit par son double, car Jacklyn souffre d’un dédoublement de personnalité. Quand on sait que la belle est en plus affublée d’un mari violent et jaloux, qui s’avère être un policier véreux, les chemins sur lesquels Chance est sur le point de s’aventurer semblent plus que tortueux.

Les fous ne sont pas toujours ceux qu’on croit, tel pourrait être le crédo de ce thriller psychologique. Si au départ les choses semblent  limpides, et les troubles psychiatriques réservés aux patients de Chance, plus on avance dans le roman, plus on se demande si les autres personnages sont réellement sains d’esprit, y compris notre bon docteur qui va se laisser embarquer dans une histoire rocambolesque à plusieurs niveaux. Le roman s’appuie surtout sur une belle galerie de  personnages secondaires, à commencer par la mystérieuse Jacklyn, dont on ne sait  si elle est manipulée ou manipulatrice. Il y a aussi l’imposant D., restaurateur de meubles, mercenaire des bas-fonds de San Francisco à ses heures perdues, et qui va devenir l’allié improbable du Dr Chance.

J’ai beaucoup aimé la première partie de ce roman, rythmée par l’inclusion des expertises psychiatriques menées par Chance, mais le soufflé est ensuite un peu retombé et je me suis perdue au fil du roman dans les choix douteux de Chance, et sa longue (longue, trop longue) descente aux enfers. C’était plutôt bien parti donc mais ce roman ne m’a finalement pas complètement convaincue, dommage ! A noter que ce roman a fait l’objet d’une adaptation en série (avec Hugh Laurie dans le rôle principal).

Chance de Kem Nunn, éditions Sonatine, 384 pages,  janvier 2017 – 21€ sur Amazon

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[Film] Joy – David O. Russel

joy

 

Jeune mère de famille, Joy a depuis longtemps perdu ses illusions et ses rêves de petite fille, malgré les encouragements de sa grand-mère. Après avoir sacrifié ses études pour s’occuper de sa famille, elle doit désormais gérer ses deux enfants, mais aussi son ex-mari qu’elle continue d’héberger dans son sous-sol, et sa mère dépressive qui passe ses journées à regarder en boucle des soap-opéras à la télévision. Quand son père, propriétaire d’un petit garage qui périclite, s’installe aussi chez elle après avoir été jeté dehors par sa petite amie, c’est la goutte d’eau !  Joy décide alors de reprendre sa vie en main et de commercialiser l’une de ses inventions, la « serpillière magique ». Mais le chemin vers le succès sera semé d’embûches: Les portes ne s’ouvrent pas facilement et le monde des affaires lui réservera bien des mauvaises surprises. Et si en plus sa famille s’en mêle…

Ce film s’inspire de la vie de Joy Mangano, business woman américaine qui se fit connaître grâce au télé-achat, qui n’en était encore qu’à ses balbutiements, au début des années 90. Le casting est prestigieux: Jennifer Lawrence dans le rôle principal, toujours juste et charismatique, Robert de Niro qui joue son père, Bradley Cooper et  Isabelle Rossellini, entre autres, et même l’apparition de Donna Mills, figure incontournable des soap-opéras (elle jouait Abby Ewing dans Côte Ouest) ! J’ai beaucoup aimé le ton décalé du film, entre drame et comédie, la famille névrosée de Joy permettant des scènes ubuesques. Un ton qui donne un supplément d’âme à ce joli film qui traite du thème un peu rebattu de l’American DreamJoy est au final un bon divertissement sur le parcours d’une femme d’exception et les vertus de la ténacité.

Et puis si comme moi vous avez aimé ce film, je vous conseille aussi le roman Une héroïne américaine (éditions Charleston), sur une autre self-made-woman à l’américaine,  Brownie Wise, qui a popularisé le Tupperware dans les années 50.

Joy de David O. Russel, sorti en décembre 2015. Disponible en DVD.

La bande-annonce:

 

 

 

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