Catégorie : Romans francophones

Du rêve pour les oufs – Faïza Guène

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Ahlème (“rêve” en arabe) a 24 ans et des aspirations de son âge, sortir avec ses copines, trouver le grand amour. Mais pas facile de trouver du temps pour soi quand on doit subvenir aux besoins d’un foyer, enchaîner les missions d’intérim, s’occuper d’un père qui a perdu la tête, et surveiller un petit frère de 15 ans fasciné par les petits caïds de la cité.

On retrouve ici la patte de “Kiffe-Kiffe demain” un rien assagi, un peu plus mature, une dose d’humour en moins contre un peu plus de mélancolie, une langue toujours aussi vivante mais qui a gagné en simplicité. L’auteur réussit à conserver beaucoup de légèreté et de fraîcheur dans ce roman qui puise pourtant dans des thèmes très lourds : les souvenirs d’Algérie et d’une mère assassinée, le triste destin d’un père qui n’est plus que l’ombre de lui même, la difficulté à trouver du boulot, l’argent facile de la cité trop tentant pour un adolescent, la carte de séjour à renouveler tous les 3 mois et le spectre de l’expulsion. Même s’il n’a pas l’originalité de “kiffe-kiffe demain”, “Du rêve pour les oufs” est un bon livre, dans lequel on retrouve avec beaucoup de plaisir ce style si personnel, ce ton sensible et tendre. Faïza Guène réussit en tous cas le pari difficile de rebondir après le succès fulgurant de son premier roman!

Hachette 2006, 210 pages, 16€

Ce que je sais d’elle – Béatrice Hammer

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Une
femme a disparu. Sa famille, ses amis, sa femme de ménage ou les commerçants de son quartier ont tous une explication différente sur cette disparition mystérieuse: enlèvement, meurtre ou
fuite volontaire ? Chacun y va aussi de son avis sur le caractère et l’existence de cette femme aux contours mouvants, mère et épouse aimantes pour certains, manipulatrice égocentrique pour
d’autres.

J’ai vraiment été enchantée par la plume de Béatrice Hammer : Avec une belle économie de moyens et beaucoup de fluidité,
elle se livre ici à un exercice de style audacieux: les courts monologues s’enchaînent, liés par un enquêteur quasi-invisible que l’on ne devine qu’à travers les réponses de ses interlocuteurs.
Les différents témoignages se complètent, se contredisent et composent le visage d’une femme aux multiples facettes. La disparue ne se révèlera jamais tout à fait au lecteur, et on ne garde
finalement en tête que l’extraordinaire complexité de ce personnage. “Ce que je sais d’elle” est moins l’histoire d’une disparition, qu’un roman sur les regards qui nous construisent… ou nous
détruisent. C’est en tous cas un récit charmant et intriguant, très agréable à lire !

Editions Arlea 2006, 143 pages, 15€
Le site officiel de l’auteur

Le cri – Laurent Graff


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Employé de péage, le narrateur assiste depuis quelque temps à un mal étrange qui décime la population. Ses collègues disparaissent un à un, et seuls quelques usagers empruntent
encore l’autoroute pour tenter de s’enfuir. Le narrateur vit désormais dans une attente entrecoupée de quelques rares rencontres, un gendarme, un couple d’auto-stoppeurs, ou une femme qui se
rend tous les jours au chevet de son mari et de son amant.
Dernier livre lu pour le prix Fnac ! C’est le vol du célèbre
tableau de Munch,  “le cri”, qui a inspiré ce roman à Laurent Graff. L’auteur mêle habilement humour et angoisse et nous entraîne dans cette ambiance irréelle de fin du monde avec
beaucoup de facilité et de simplicité. J’ai particulièrement aimé le côté absurde du récit: le peu d’angoisse que la situation semble générer chez les personnages, leur difficulté à abandonner
les codes habituels de la société (travail, uniforme, horaires…), le calme du narrateur pourtant confronté à l’incompréhensible. J’ai cependant été un peu déconcertée par la fin du livre, et
j’avoue que je ne suis pas sûre d’avoir saisi toutes les subtilités du dénouement. Malgré ce bémol, j’ai vraiment été séduite par ce récit étrange et original, par l’écriture et l’univers de
Laurent Graff , qui m’a un peu rappelé celui de Joël Egloff…
Le dilettante 2006, 121 pages, 14€

La vie de bureau – Jean-Michel Delacomptée

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Encore un livre lu pour le Prix Fnac. Je renonce à vous faire
un résumé en bonne et due forme de ce roman… Disons qu’un sexagénaire à l’existence insipide tente de séduire l’une de ses jeunes collègues aux dents longues, en tous points opposée à lui. Je me
suis rapidement ennuyée avec ce personnage vieillot et réactionnaire. On s’englue dans ses bavardages interminables sur son combat quotidien contre le bruit, sur sa passion du baiser,
sur son rêve d’une retraite tranquille. L’intrigue minimale n’est finalement qu’un prétexte à une suite de discours plutôt creux sur la vie moderne.  Au prix de redoutables efforts, j’ai
réussi à lire 150 pages, soit environ la moitié du roman, avant de renoncer et de laisser ce livre de côté. C’est d’autant plus dommage que le style est très élégant, et qu’il aurait fait
merveille au service d’un contenu plus consistant ! Mais “La vie de bureau” est à l’image de son personnage, sans relief et sans saveur.
Calmann-Levy 2006, 284 pages, 17 euros

Julien Parme – Florian Zeller

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Julien Parme a 14 ans et entretient des rapports très conflictuels avec sa mère, son beau-père et la fille de celui-ci. Alors que sa mère lui a interdit de se rendre à une
soirée chez Mathilde, la fille dont il est amoureux, Julien fugue. S’ouvre alors devant lui une nuit de liberté et d’errances dans les rues de Paris, faite de rencontres, et de questionnements
sur son passé (la mort de son père) ou son avenir (sa carrière de grand écrivain).

Voilà donc l’un des quatre titres que j’ai lu pour le prix
Fnac
. Florian Zeller est une cible privilégiée des médias, et bien avant la sortie de Julien Parme, le roman se faisait déjà descendre ici et
. Je n’aime pas hurler avec les loups, et j’ai donc essayé d’aborder ce livre sans
a-priori. Malheureusement, 300 pages plus tard, il faut bien me résoudre à rejoindre la meute… L’auteur a jeté tout ce qui fait la complexité et la richesse de l’adolescence pour réduire son
personnage à une triste caricature bête et égocentrique. Sans nuances et sans profondeur, Julien Parme n’est qu’une tête-à-claques que ses quelques failles (la mort de son père) ne parviennent
pas à rendre plus intéressant ou plus touchant. Le style, qui imite maladroitement le langage des adolescents (version beau quartier) est grotesque et agaçant, les tentatives d’humour tombent
complètement à plat. Un roman ennuyeux, froid et superficiel, qui manque de coeur et de sens, tout à fait optionnel dans cette rentrée littéraire.
Flammarion 2006, 302 pages, 17€