Catégorie : Romans francophones

“Le pacte des vierges” de Vanessa Schneider

Pour écrire Le pacte des vierges, Vanessa Schneider s’est inspiré d’un fait divers survenu en 2008 dans l’Amérique profonde. 17 adolescentes de Gloucester, un patelin du Massachusetts, fréquentant le même établissement scolaire, étaient tombées enceintes suite à un « pacte ».  Quatre d’entre elles, Lana, Cindy, Kylie et Sue, acceptent de se confier à une romancière française. A travers leurs témoignages croisés on découvre comment elles en sont arrivées à mettre en place ce projet fou et absurde.

Au fil des pages la romancière et son lecteur essayent d’assembler les pièces du puzzle. Toutes âgées de moins de 16 ans, ces jeunes filles ont déjà tout vu, tout vécu. La majorité d’entre elles ont grandi avec un entourage familial défaillant, des parents démissionnaires qui n’assument plus leur rôle, absents, en prison, alcooliques, ou accro aux médicaments (Cochez la case correspondante à votre situation). Ou au contraire pour Sue, des parents puritains, exigeants et étouffants. Ajoutez à ça l’oisiveté, et la précarité dans une petite ville frappée de plein fouet par le chômage. Un terreau plus que favorable pour que des jeunes filles influençables, livrées à elles-mêmes, se laissent convaincre par ce projet dément imaginé par la meneuse de la bande, Lana.

J’ai été à la fois consternée par la folle décision de ces gamines, et émue par leur fragilité et leur naïveté. Ces quatre adolescentes brandissent leur grossesse comme un étendard, elles pensent avoir trouvé là l’opportunité de changer de vie : Elles vont élever leurs enfants ensemble, se créer une nouvelle famille, de nouveaux repères. Faire mieux que leurs parents.  Il y a tellement d’espoir dans ces grossesses, l’espoir d’un lien indéfectible que rien ne pourra briser, l’espoir de ne plus jamais être seules. Au fur et à mesure que leurs grossesses avancent, elles comprendront malheureusement que les choses ne sont pas aussi simples.

Cette histoire est effrayante, fascinante, mais le roman ne parvient pas à transcender le fait divers. En sait on vraiment plus quand on tourne la dernière page ? Les caractères manquent de consistance, l’angle choisi (ne donner la parole qu’aux jeunes filles) m’a paru souvent réducteur. L’auteur cherche en plus à créer un suspens artificiel et sans beaucoup d’intérêt autour de quelques éléments secondaires (des rendez-vous dans une vieille caravane près de la voie ferrée, le rôle d’un mystérieux « John »). Au fond c’est le fait divers qui est passionnant ici, bien plus que le roman lui-même, et il aurait sans doute mérité mieux que cet habillage un peu trop léger.

Editions Stock 2011, 190 pages/

Lu dans le cadre des matchs littéraires organisés par Price Minister.

[Roman] Une femme célèbre – Colombe Schneck

Figure de la télévision française dans les années 60 (elle présentait l’émission “Discorama” tous les dimanches) Denise Glaser a été licenciée en 1975 pour ses prises de position politiques, et après avoir espéré pendant des années pouvoir revenir sur les petits écrans, mourra finalement dans la plus grande solitude en 1983. Trente ans plus tard, Jeanne Rosen, journaliste et romancière, compare son parcours chaotique à celui de Denise Glaser, et s’interroge sur la célébrité.

Colombe Schneck se cache à peine sous le masque de Jeanne Rosen: Toutes deux romancières, Jeanne a écrit un livre sur sa grand-mère quand Colombe en a écrit un sur son grand-père (L’increvable Monsieur Schneck), ont travaillé pour la télé et la radio, ont essuyé beaucoup de critiques, notamment sur leur élocution…  On imagine donc que les données plus personnelles (Jeanne a un mari alcoolique, un enfant différent, et un grand critique littéraire comme amant) concernent aussi l’auteur et elles revêtent du coup un côté très impudique. Si vous souhaitiez en savoir plus sur Colombe Schneck donc, vous serez ravis, si vous vous intéressiez plutôt à Denise Glaser en revanche, vous serez fort déçus! Alors que la quatrième de couverture lui accorde une large place, les quelques lignes qui lui sont consacrées dans le roman sont en fait bien maigres.  Et hormis le fait qu’elles ont évolué dans le même milieu, difficile de comprendre en quoi Jeanne Rosen/Colombe Schneck s’est reconnu en Denise Glaser et de leur trouver des points communs… Reste donc  la sensation désagréable que cette pauvre Denise n’est qu’un faire-valoir, un prétexte pour que la narratrice puisse  mieux parler d’elle-même.  La construction est confuse et hachée, un vrai cache-misère qui tente maladroitement de camoufler le manque de matière.  Car si l’on déshabille un peu ce roman, qu’on le débarrasse de ses prétentions gluantes, il ne reste rien ou presque, si ce n’est l’histoire banale d’une femme qui s’interroge sur sa carrière et sa vie amoureuse, un livre désespérément creux, superficiel et égocentrique.

Editions Stock 2010, 150 pages, 15€.

C’

c'était notre terre

Note/ 2 étoiles

Exilée en France, devenue une “pied-noir” que ses voisins méprisent, Claudia se souvient avec nostalgie de son enfance dorée en Algérie et du domaine de Montaigne dans lequel elle a grandi. A sa voix se mêlent celle de sa sœur Marie-Claire, entrée dans les ordres, et celles des autres membres de la famille disparus depuis longtemps, son frère Antoine, leurs parents Hortense et Ernest, et leur domestique, Fatima. Six voix, six points de vues différents qui permettent de dessiner une image complexe de l’Algérie entre les années 40 et les années 60.  Si Claudia et ses parents n’ont jamais douté de leur bon droit à occuper cette terre algérienne, Antoine, lui a décidé de rejoindre les rangs du FLN.

Ce qui frappe d’abord quand on ouvre ce roman c’est son style très particulier, sans aucun point, basé sur un système très travaillé d’interruptions et de répétitions. Il désarçonnera sans doute plus d’un lecteur, mais il ne m’a pas franchement gêné, je l’ai même trouvé plutôt séduisant et poétique. Me laissant porter par ce chant, j’ai beaucoup aimé le début du livre (je suis plutôt friande de ce genre de roman polyphonique).  Mais je me suis vite electronic cigarette testimonials lassée de cette histoire trop répétitive, revenant  sans cesse sur les mêmes faits, le roman tourne en rond, et le lecteur aussi! Hormis peut-être Antoine, les personnages m’ont semblé aussi très caricaturaux: les colons sont arrogants, bien campés sur leurs certitudes, affichant un mépris sans failles envers les algériens. Le roman s’ouvre d’ailleurs sur cette phrase prononcée par Claudia, et qui donne très justement son titre au livre: “C’était notre terre”. Mais les algériens n’en sont pas pour autant plus sympathiques, laissant libre-cours à une violence sans limites dès que le vent tourne… Ce sont certaines scènes particulièrement sauvages qui ont eu raison de ma patience (je pense notamment à ce passage où des algériens ouvrent le ventre d’une femme enceinte avant de dévorer le fœtus). Et j’ai finalement abandonné ce livre au bout de 350 pages.

Le livre de poche 2010 (1ère édition Albin Michel 2008), 507 pages, 7,50€. Ce livre m’a été offert par l’éditeur.

Canel a abandonné elle aussi, pour Antigone il y a dans ce roman “quelque chose d’extrêmement fascinant et de beau”, Praline n’a pas aimé le style mais retiendra “l’arrière plan politique et culturel”, pour Emmyne c’est “une lecture passionnante”.

Palestine – Hubert Haddad

Palestine

Note/ 2 étoiles

Alors qu’il s’apprête à partir en permission, Cham, un jeune soldat israélien est enlevé par un commando palestinien. Il parvient à s’échapper et est recueilli par deux palestiniennes, Falastin et sa mère aveugle Asmahane. Blessé, en état de choc, Cham a oublié son identité. Les deux femmes le pensant palestinien, Falastin le fait passer pour Nessim, son frère disparu.

Hubbert Haddad s’attaque ici à un sujet délicat à travers cette histoire improbable d’un jeune Israélien amnésique qui va partager la vie quotidienne des Palestiniens:  la terreur, la violence, les humiliations  qu’ils subissent chaque jour, le désespoir et la haine qui nourrissent le conflit entre les deux peuples et le terrorisme. Certaines scènes sont d’une violence indescriptible, pourtant je n’ai pas réussi à être vraiment touchée par ce récit, hormis quelques passages concernant Falastin, dans lesquels elle évoque la mort de son père. Le style m’a paru froid, maintenant d’un bout à l’autre une certaine distance avec les faits, et dans l’ensemble l’histoire n’est pas très crédible (le roman se termine d’ailleurs sur une pirouette elle aussi peu plausible). Le personnage principal est étrangement absent, fantôme sans mémoire et sans substance, pouvant être aussi bien Cham que Nessim, Israélien ou Palestinien. Un parti-pris de l’auteur sans doute, mais qui empêche le lecteur de s’attacher vraiment au personnage.

Je n’ai donc pas du tout été convaincue par cette lecture, mais je suis cependant consciente que mes lacunes géographiques et historiques ont desservi ce roman: je me suis rendue compte dès les premières pages que je connaissais bien mal cette région du monde (si ce n’est par les bribes d’infos délivrées par les  journaux télévisés).  J’ai donc eu beaucoup de mal dès le début à situer les personnages et me suis vite sentie perdue au milieu de très nombreuses références à une culture qui ne m’est pas familière…

Le livre de poche 2009, 155 pages, 5,50€

Une lecture commune avec Sylire.
Lu aussi par Dédale (Biblioblog), Noryane, Karine, Yv, Le bibliomane

Mes petites morts – Elsa Fottorino

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3 etoiles

Pour fuir Paris et une relation trop fusionnelle avec sa sœur enceinte, Anna part s’installer en Irlande, à Cork, “une ville de brouillards”. Elle y rencontre Marek, un jeune Tchèque gravement malade, mais malgré les sentiments qu’ils éprouvent l’un pour l’autre, Marek choisit de garder ses distances avec la jeune femme et de lui cacher sa maladie. Anna se console alors dans les bras d’un jeune allemand, Otto, fou amoureux d’elle. Sur l’air de “Je t’aime moi non plus”, elle construit avec ces deux hommes une double relation fragile, entre non-dits, mensonges, illusions et frustrations…

L’histoire est assez convenue, une énième variation sur le thème du triangle amoureux (au cours du roman Elsa Fottorino évoque d’ailleurs elle même le film “Jules et Jim” de François Truffaut), mais les personnages sonnent juste: j’ai aimé l’indécision d’Anna, l’exaltation d’Otto, et la touchante maladresse de Marek qui ment à la jeune femme, qui la fuit pour mieux la protéger (ou pour se protéger lui même?). Dommage en revanche que l’écriture, trop travaillée, trop rigide, ressemble un peu à une démonstration formelle. “Mes petites morts” n’est pas un livre déplaisant, mais j’aurais aimé  plus d’audace dans le sujet et de simplicité dans le style.

***

Pour l’anecdote, Elsa Fottorino n’est autre que la fille d’Eric Fottorino, écrivain lui même et directeur du journal Le Monde.  Et quand j’ai cherché quelques infos sur ce livre avant ma lecture,  le premier article sur lequel je suis tombée était celui… du Monde. (dithyrambique bien sûr!).

Flammarion 2010, 147 pages, 13€
Lu dans le cadre du club des lectrices de Femme Actuelle.